Le squat Airbnb : un phénomène médiatisé mais rare
Selon un fact-checking de TF1, aucune donnée officielle ne prouve une explosion des squats liés à Airbnb. Le ministère de l’Intérieur n’a pas de statistiques précises, et l’association Action Propriétaires Solidaires ne constate pas de hausse spécifique par rapport aux squats classiques.
En résumé : le risque existe, mais il reste marginal. Cependant, quand un cas survient, ses conséquences peuvent être dévastatrices pour la saison de location.
Comprendre la différence juridique entre squat et maintien illégal
La confusion vient du fait que, dans ces affaires, l’occupant est entré légalement dans le logement (réservation validée, remise des clés). Il ne s’agit donc pas d’un squat au sens strict de la loi « anti-squat » du 27 juillet 2023, mais d’un maintien dans les lieux après expiration du contrat.
Conséquence :
- Pas d’expulsion immédiate par la police
- Obligation de saisir le juge via une procédure civile (référé ou référé d’urgence)
- Délais moyens observés : plusieurs mois avant une décision d’expulsion.
Le cadre légal : ce que dit la loi, délais et risques pour le propriétaire
En France, la distinction juridique est essentielle :
- Le squat au sens strict est défini à l’article 226-4 du Code pénal comme « l’introduction et le maintien dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ». Ce délit est passible de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.
- Depuis la loi du 27 juillet 2023 (n° 2023-668), la procédure d’expulsion des squatteurs a été accélérée par l’article 38 de la loi DALO, permettant au préfet de faire intervenir les forces de l’ordre sous 72 heures après constat.
Problème dans le cas des squats Airbnb : l’entrée est initialement légale (réservation, remise de clés). Le voyageur devient donc un occupant sans droit ni titre une fois la date de départ passée. Cette situation ne relève pas de la procédure administrative d’urgence mais du droit commun des expulsions, qui impose :
- Saisine du juge des contentieux de la protection (article L.411-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution)
- Délai moyen : 3 à 6 mois, parfois plus selon les tribunaux
- Application possible de la trêve hivernale selon l’appréciation du juge
Attention : un propriétaire ou gestionnaire qui expulse lui-même l’occupant sans décision judiciaire s’expose à des sanctions pénales au titre de l’article 226-4-2 du Code pénal :
« Le fait de forcer une personne à quitter un lieu qu’elle occupe sans avoir obtenu le concours de l’État est puni de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende. »
Cela inclut le changement de serrure, la coupure d’eau ou d’électricité, ou toute forme de pression physique. En clair, même si le maintien dans les lieux est illégal, seule une expulsion judiciaire est autorisée.
Les conséquences pour les gestionnaires et conciergeries
Un squat Airbnb peut :
- Bloquer le bien pendant des semaines
- Annuler des réservations déjà payées
- Générer des coûts importants (avocats, constat, perte d’exploitation)
- Nuire à la réputation et à la relation client
Un seul incident peut suffire à désorganiser toute une saison, d’où la nécessité d’une gestion préventive stricte.
Les signaux d’alerte avant un séjour
Plusieurs affaires récentes montrent un modus operandi récurrent :
- Réservation courte puis demande de prolongation
- Changement des serrures
- Tentatives de transfert des compteurs d’énergie
- Refus de départ à la date prévue
Signaux à surveiller :
- Voyageur sans historique ou avis
- Pièce d’identité douteuse ou discordante
- Moyen de paiement inhabituel
- Demandes insistantes pour un accès autonome ou des doubles de clés physiques
Les solutions préventives pour éviter un squat Airbnb
Pour limiter les risques, une conciergerie peut mettre en place :
- Vérification renforcée des voyageurs (identité, historique, avis)
- Contrat de location saisonnière écrit précisant la durée et les conditions de départ
- Dépôt de garantie adapté
- Systèmes d’accès connectés (codes temporisés, suivi des ouvertures)
- Limitation de la durée des séjours à haut risque
- Politique claire en cas de dépassement de séjour
Que faire en cas de maintien illégal dans le logement ?
Si un voyageur refuse de quitter les lieux :
- Constituer immédiatement un dossier de preuves (captures d’écran, échanges, état des lieux, constat).
- Informer la plateforme de réservation.
- Faire constater la situation par un commissaire de justice.
- Saisir rapidement le juge des contentieux de la protection (référé) pour obtenir une ordonnance d’expulsion.
Éviter toute expulsion sauvage (couper l’électricité, changer les serrures, etc.), car ces pratiques sont pénalement répréhensibles.
La trêve hivernale et les locations saisonnières
La trêve hivernale (1er novembre – 31 mars) ne s’applique pas aux squatteurs au sens de la loi. Cependant, dans le cas d’un maintien après une location saisonnière, l’appréciation revient au juge. Il est donc important d’agir rapidement avant cette période pour éviter des délais supplémentaires.
En conclusion
Le squat de logements Airbnb reste un phénomène peu fréquent mais aux conséquences potentiellement catastrophiques pour les propriétaires et les conciergeries.
En appliquant des procédures strictes de sélection, de contractualisation et de suivi, il est possible de réduire considérablement ce risque.
La clé ? Anticiper plutôt que subir, réagir vite et documenter chaque étape pour que la justice puisse trancher rapidement.
Sources :